Re: Obsèques (3)
[Voici la cérémonie telle qu’elle se déroulera. Vous pouvez à tout moment déclarer comment vous intervenez dans chaque phase, on pourra faire des flash-backs si nécessaire. On a rendu ses armes à Yiran]
La matinée touche à sa fin, et il est temps que la cérémonie commence. Elle durera jusque tard dans la soirée. Tout le clan se réunit autour de la fosse déjà prête. Elle contient la chambre mortuaire du Bek, une chambre annexe pour ses suivants et une pour son cheval, dans laquelle sont fichés des pals. Tout autour se dressent des pierres. L’une d’elle est même grossièrement taillée en une forme anthropomorphe. Les guerriers ont revêtu leurs armes, et Yiran, ayant récupéré les siennes, se tient à côté de son fils Ayu-Kulak accompagné de son loup Trouvé. Bumin Khan est entouré de ses fidèles, équipés d’armes et d’armures rutilantes, décorées de rubans de soie, d’or et pour Bumin de pierres. Son frère Bilge est arrivé. Les femmes portent leurs robes chamarrées. Elles ont passé la matinée à mettre en forme leurs coiffures en cornes. Kenjeke est parmi les plus richement vêtues. Elle n’accorde pas un regard à Ayu-Kulak.
Les chamans approchent, équipés de leurs tambours, précédant le cortège portant le squelette équipé de Be-Toro. Ak-Tchenem mène leurs incantations. Tchoyun et Ay-Salkin accompagnent le corps porté par ses guerriers fidèles. Il est suivi de son cheval au harnais d’or, et sur la tête duquel on a fixé une coiffe ornées de bois de cerfs plaqués d’or. Les autres femmes de Bek-Toro suivent la troupe d’un air triste et résigné. Un couple d’esclaves entravés aux yeux révulsés de terreur ferment la marche, escortés par de guerriers.
Bek-Toro est allongé dans la fosse avec force cérémonie. Il est ceint de son sabre et revêtu de son armure de fer. On dépose à ses côtés son arc et sa lance et on lui met sept flèches dans la main. Puis commencent les élégies. Tchoyun, Ay-Salkin, des guerriers fidèles… entre deux élégies, la famille et les proches font le tour de la tombe en se lamentant, les hommes se taillant le visage avec un couteau. Sept fois ils tourneront et sept fois ils se tailladeront le visage, sous le son lancinant de la foule qui pleure, et Bumin est parmi eux. Il complimente le « fidèle shad (général), toujours prêt à accompagner sans aucune hésitation son khan dans les guerres » et déclare que « Tengri l’a rappelé à lui pour le récompenser et offrir à son successeur la chance de gagner à son tour une gloire nouvelle ». Lorsque Kökötöy se joint à eux, un murmure parcourt l’assemblée, mais nul ne s’y oppose. À la fin des élégies, les visages ensanglantés des guerriers sont effrayants.
Puis viennent les dons. La fosse est remplie d’objets d’or utiles à la vie dans l’Au-Delà . On fait approcher la femme favorite de Bek-Toro, encore jeune et vêtue comme une begum. La résignation se lit sur son visage, et même l’appréhension. Elle se met à genoux, Ak-Tchenem dit quelques paroles de réconfort et la recommande aux esprits, mais le sourire de la belle est forcé et ne cache pas ses yeux mouillés. Puis elle est étranglée. On la dépose respectueusement dans la chambre à côté de celle de son mari qu’elle accompagne chez les morts.
Puis vient le tour du couple d’esclaves. Ceux-ci sont des étrangers qui ne comprennent pas l’honneur qui leur est fait, pleurent et implorent la grâce. Ils sont étranglés eux aussi et rejoignent l’épouse dans la tombe.
Le cheval préféré de Bek-Toro est alors mené vers la tombe. L’odeur du sang le rend nerveux, les guerriers doivent le tenir. Il est proprement égorgé, et ses âmes sont recommandées à la nature. Tout équipé, il est tenu droit dans la tombe par les pals sur lesquels on le dispose.
Des esclaves referment la tombe avec des claies, puis recouvrent le tout de lourdes pierres plates et de terre. La tombe forme maintenant un monticule autour duquel on dispose les balbals, pierres représentant les ennemis tués par Bek-Toro, et elles sont nombreuses ! Bek-Toro était un des personnages les plus importants parmi les Türks, certains balbals seront donc habités par ces esprits ennemis pour protéger sa sépulture.
Alors que des esclaves allument de grands feux, on amène les bêtes à sacrifier pour que les Ayyi reçoivent Bek-Toro et acceptent de lier des esprits morts aux balbals. Elles aussi sont nombreuses et bien grasses après avoir pâturé tout l’été ! Il y a beaucoup de bÂœufs, mais aussi des chevaux qui sont égorgés un à un pendant que les chamans sont en transe. Tchoyun fait venir un magnifique taureau. Il place la pointe de son sabre près de l’épaule pour l’enfoncer jusqu’au cÂœur, mais le taureau se rebiffe et, bien qu’entravé, fait choir Tchoyun sur son séant (il le renverse sur le cul en quelque sorte). Les 800kg de muscles trépignent, les chamans se disent quelques mots puis reprennent leurs imprécations, la foule murmure à nouveau. Un chaman noir entame une transe animale et le taureau finit par se calmer. Le bruit courra qu’un esprit s’était emparé du taureau de Tchoyun.
Les esclaves apprêtent les carcasses au fur et à mesure. On enlève les entrailles, les bêtes sont farcies d’herbes, d’ail sauvage, de serpolet, de riz ou de céréales achetés aux Wei. On y jette des pierres brûlantes sorties du feu, on recoud la peau et les bêtes entières sont posées sur les énormes foyers. L’odeur de la chair qui grille est alléchante. Des litres de koumis sont versés en libations, et plus encore seront bus. Les bardes commencent à jouer de leur harpe et à chanter de leur voix de gorge. Bonne-Fortune improvise une suite à la saga des Türks, dans laquelle Bek-Toro accomplit des exploits dont nul ne remet en cause la véracité.
Lentement, le soir arrive. Les bêtes sont cuites, on répartit les morceaux. Les dieux se contenteront des fumées, les chiens des os et les esclaves, toujours de service et préparant les boudins et autres abats pendant que les hommes et femmes libres ripaillent, auront les restes. La nuit tombe et avec elle la fraîcheur automnale que l’on combat en s’approchant des foyers et en buvant force koumis. Les esprits seuls savent ce que l’excès de boisson libèrera chez les membres du clan rassemblés.
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